jeudi 29 octobre 2015

Je suis ouverte d'esprit

Ca n'est un secret pour personne, je traine sur les sites de rencontres depuis Hérode, voire même avant. Il est un temps que les gens de 20 ans ne peuvent pas connaître, où meetic n'existait pas, ou internet servait juste aux geek, ou les rencontres se faisaient par le 3615, voire même, le 3615 avait 8 chiffres ...

Bon, c'est vrai qu'il y a un gros avantage à la popularisation des rencontres online, c'est que pour celui qui trie un peu, il reste quelques chances infimes de trouver une pépite (voir mon précédent décryptage ici).

En quête de pépite, on passe au chapeau chinois tout un tas de sables et d'alluvions. Sur certains sites de rencontres, c'est un peu la même chose. On engage la conversation, on essaie de vite percuter pour éviter que la conversation soit contenue sur la pluie et le beau temps, et on laisse le temps faire, pour voir s'il y a assez de densité pour qu'une éventuelle pépite reste au fond de la batée.

Mais aussi, en quête de pépites, on lit les informations personnelles, et le petit texte que chacun inscrit (ou laisse vide intentionnellement) ... et des questions se posent vite. Du coup, j'ai creusé, interrogé, me suis intéressé, partagé des confidences, ...



Je vous passe les fiches assez classiques qui présentent sans contraste un profil impossible à cerner en quelques lignes. Il est aussi impossible de cerner vraiment les profils très contrastés, qui se présentent avec en porte étendard un caractéristique majeure, qui évite d'exposer qu'on est tous bien plus complexe, et qui cherche souvent son alter ego dans la même veine (une motarde cherchera un motard, un fan de voyage cherchera un voyageur, une maman cherchera un homme à l'aise avec les enfants et protecteur, ...).

Je vous passe aussi le procès d'intention, retour d'expérience, sous forme de "je ne sais pas ce que je veux, mais je sais ce que je ne veux plus", qui 3 lignes plus loin, réclament un homme qui ne regarderaient qu'elle, "un homme qui sait ce qu'il veut".

Mais, ce qui m'a vraiment intrigué, sur le site où je traine ces temps ci ... c'est "Je suis ouverte d'esprit". Car là, dès qu'on creuse un peu, c'est très varié et très intime.

Tout d'abord, j'ai trouvé tout une galaxie de femmes, qui ne souhaitent plus vivre leur sexualité, voire leur duo, comme étant lié avec un toit commun. Je pense que la somme de mauvaises expériences les a forcé à distinguer l'utilisation de leur propre espace-temps, de la construction d'une intimité avec un autre. Question d'autonomie, mais question de frontières aussi. Je veux bien partager avec toi, jusqu'à un intime très intense, mais je ne veux pas tout partager, parce que je ne t'appartiens pas, je n'appartiens qu'à moi et jamais plus à un homme qui étouffera lui aussi, je veux être respectée, notamment dans mes choix (quand, comment, où, quoi, ...).

J'ai aussi trouvé des femmes qui s'égarent, qui en mettant "je suis ouverte d'esprit", oublient qu'elle sont dans la case sexualité, et elle parlent là de leur tolérance en général, de leur lecture de la société dans laquelle nous vivons, ... Longues discussion sur la politique et le sociétal ... très intime aussi ... un peu décalé sur un site de rencontre. Parfois, le désir nait de "j'ai l'impression que tu me comprends".

Dans certains cas, j'ai rencontré une lecture personnelle de "ouverte d'esprit", sur une approche encore moins conventionnelle de trouver quelqu'un pour qui compter. Des approches du genre "je pourrais envisager un homme marié" ou "l'amour à distance" .. du moment que ça me nourrit et me remplit, et que je sais que j'ai quelqu'un pour qui je compte.

J'ai aussi eu quelques retours empreints de franchise, sur les pratiques sexuelles. Lors de ces discussions, il est apparu que pour certaines, hétérosexuelle veut dire sexualité classique. Dès que l'on y met une coloration fantasmatique, ou pratiques sexuelles hors de la position du missionnaire et de la levrette ... alors, on est "ouverte d'esprit". C'est une case où certaines lisent ... je suis ni une salope, ni une fille coincée.

Ajoutez à ceci celles qui s'ouvrent vers des pratiques plus sulfureuses, comme domination ou fétichisme, mais c'est vraiment bien plus rare sur ces sites de rencontre grands public et modérés, car généralement, ce sont vers d'autres sites plus ... disons ... directs, que ces pratiques baroques ou style donjon trouvent un terreau propice pour fleurir.

Dans les multiples confidences, ce qui est vraiment beaucoup plus rare, ce sont les femmes "ouvertes d'esprit" qui ont une lecture telle que présentée, c'est à dire entre "hétérosexuelle" et "bisexuelle".

Pour avoir parlé à quelques dizaines, c'est une lecture de leur sexualité qui va de assumée à libertine.
J'entends par assumée que croiser un corps féminin, ou glisser vers la pluralité des sens les exalte largement autant que le prince charmant les embarquait à 20 ans.

J'entends par libertine, une approche du sensuel, du charnel déconnecté des affaires de coeur, tout en préservant le respect, la tendresse. Une approche sans enjeu, libératrice pour certaines, et pour se protéger pour d'autre, en évitant d'exposer son coeur à de futures blessures.

Mais voilà, une fois tout ce camaïeu présenté ... quelle en est la lecture, forcément plus binaire, des mâles qui lisent ces fiches ???

jeudi 22 octobre 2015

L'amour dans le silence (complet)

Il est des moments où on regrette le "Zob in Job", et des moments où c'est vraiment délicieux.

J'ai été confronté quelques fois à de belles aventures avec une amante avec qui je bossais. Ce qui est vraiment unique dans ce genre d'histoire, c'est qu'on accède à l'intime d'une personne, tout en ne quittant jamais vraiment l'armure / posture qu'elle vous affiche en public le reste du temps.

Ça donne mille moments uniques qui ne peuvent pas avoir lieu dans un contexte d'amants qui ne se croisent pas le reste du temps. Parce que finalement, une amante sur le lieu professionnel, on finit par la croiser beaucoup beaucoup, et être obligé de se restreindre coté discussions, pauses café, et regards complices, pour ne pas être pris sur le fait. Cette complicité est pourtant si douce, que la tentation est grande et grandissante de favoriser ces instants communs, de jouer de ces complicités cachées, de se lover dans le drap de la clandestinité aux yeux de tous. Je me souviens par exemple de couples qui se sont formés sur le lieu du travail. En ressortant de vieilles photos de groupe, on pouvait s'apercevoir qu'ils étaient déjà constamment à coté une dizaine d'année avant leurs divorces respectifs et leur nouvelle histoire commune officielle.

Pour ma part, la vie m'a offert une superbe aventure avec une femme qui était dans un planning très parallèle avec le mien pendant une très longue période, et nous nous sommes trouvés plusieurs fois dans le même hôtel.... délices

Ô douce nuit, Ô belle nuit .... que nenni, ce fut torride ! Et à chaque fois.

Mais la fois qui me revient vraiment en mémoire s'est passée dans un tout petit hôtel, nous étions une vingtaine, vingt chambres réservées, sur un total d'une trentaine pour tout le bâtiment je crois. Les couloirs étaient courts, les parquets craquaient, les murs pas si épais que ça, et chacun savait qui était dans chaque chambre.

Lorsque le diner et la soirée se sont terminés, je suis monté dans ma chambre, et je l'ai attendue, attendue ... et attendue. Lorsque enfin la porte restée entrouverte s'est mise à grincer, j'ai su qu'elle arrivait ... sur la pointe des pieds, après être entrée dans sa chambre sous les yeux de nos collègues communs pour l'alibi, et donc ressortie comme une féline en chasse.

Nos corps se sont retrouvés sous les draps, dans le noir ou presque, dans le silence le plus total. J'ai détouré son corps nu, pour réchauffer de mes mains chaudes, restée longtemps sous les draps à l'attendre. Ses hanches, mes mains, ses seins ...

Puis rapidement, nos corps se sont trouvés sans avoir à se chercher longtemps. Face à face et sans détour, ma bouche a pris la sienne, son orchidée s'est ouverte à mes désirs, ses mains et des cuisses ont verrouillé mon corps immobile en elle. Mes élans contraints, mon bassin s'entrechoquant avec le sien ont fait jaillir quelques râles de plaisir de sa bouche.

- "Chut !!!!"

Je lui intimai vite le silence, tellement cet hôtel aurait pu raisonner de nos élans secrets vers des oreilles pas prêtes du tout à renoncer au calme de la nuit du businessman, ni à partager un chemin de travers de plaisir et de luxure sans en faire usage par des regards, biais ou autres allusions dont nous voulions nous préserver.

J'ai gardé ma main sur sa bouche et pris possession du rythme comme de son corps. Impossible de l'embrasser, impossible d'embrasser son orchidée, impossible de me servir de ma seconde main sur laquelle je m'appuyais ... j'ai vite fait le tour de son corps pour lui livrer des assauts plus profonds tout en glissant mes baisers sur le haut de son dos, sa nuque, le lobe de ses oreilles ... les muscles bandés, elle m'offrait sa croupe cambrée tout en subissant la force de ma main sur sa bouche. Un sublime dos, une courbe baignée d'une lumière rasante, des muscles saillants ... Comme ligotée dans cette paume, qui bloquait jusqu'à sa respiration parfois, elle s'arcboutait pour offrir le meilleur accès à son antre. Je sentais le plaisir l'envahir et mon corps se préparer à défaillir. Mais qui allait retenir mes propres décibels ... ?

C'est lorsque j'ai senti son corps flancher, perdre le contrôle et spasmer comme soumise à un frisson hurlant courant de la nuque au bout des pieds en embrasant la colonne et les reins, que son râle et son souffle se sont heurtés à ma paume, comme un cage anti orgasme profond et complet. J'ai senti sa morsure sur ma main, forte, sans retenue, reflexe. La prisonnière se libérait de mes précautions, et fondait en silence, un long râle muet. La force de l'orgasme transférée sur son corps électrisé, plutôt que dans des cris libérateurs ... et ma douleur me faisant redescendre immédiatement en contrôle de mes fluides ....

J'ai glissé en scandaleux va et vient de stupre, maintenant nos corps si distants, elle scotchée au septième ciel, et moi, la main meurtrie, la douleur ayant décuplé ma fermeté enfouie en elle, à l'autre bout de l'escalier du plaisir, redescendu comme en trébuchant tout au début des marches du désir....

Endormis tous les deux l'un dans l'autre, réveillés au bout de quelques dizaines de minutes, lorsque l'orchidée ne peux plus retenir ma fougueuse proue, nous avons enchainé les balancements charnels et les demi heures à comater tels deux corps scellés. Amalgame de chair ne se dénouant que pour reprendre une nouvelle montée de désir.

Le lendemain, fourbus mais comblés ... il a fallu quelque agilité pour glisser d'une chambre à l'autre et quelques cafés forts pour garder les yeux ouverts jusqu'à la fin de ces réunions devenues sans intérêt aucun.

vendredi 16 octobre 2015

L'amour avec deux amants ? D'accord, mais pas avec toi !

Les fantasmes ne sont délicieux que s'ils franchissent la frontière du charnel un jour en ayant pour but le plaisir, et s'ils ne laissent pas de blessures.

Je me suis toujours opposé au concept des fantasmes qui devraient rester dans le domaine du rêve, dans la boite à fantasme qu'on enfouit au fond de soi, dans le monde imaginaire qu'on s'invente pour colorer arc en ciel un quotidien moins exaltant, pour idéaliser ce que le charnel pourrait être, sans jamais vraiment l'effleurer. Y compris pour moi-même.

C'est souvent avec des femmes que cette frontière a fait l'objet de longues et interminables discussions. Je comprends que le fantasme de Georges Clooney ou de la brigade de pompiers doivent rester du domaine du fantasme, parce que vraiment inatteignables. Mais, dans ce que les femmes en général, et mes correspondantes en particulier ont eu loisir de débattre avec moi, et d’échafauder comme joute épistolaire ... il y a tellement de possibles qui peuvent être mis en musique comme une symphonie des sens, qu'il serait trop dommage de s'asseoir dessus à cause d'une croyance limitante ou d'un verrou empêchant de franchir le pas, la porte du réel. Regardez donc les mille sites web qui font maintenant leur marronnier des Top 10 des fantasmes féminins.

Une fois qu'on a fait le tour de la question, c'est à dire le pour et le contre, et comprendre que le fantasme se réalisant doit être aussi une recherche du plaisir, apparait aussi la question de l'interdit. Braver l'interdit que l'on avait, chacun ayant ses limites, peut faire tomber tout glamour à une situation. J'ai personnellement touché des murs dont je n'aurais pas dû m'approcher, et d'autres fossés que je croyais infranchissables se sont révélés petits ruisseaux qui s'enjambent pour courir dans de nouvelles prairies du plaisir.

Néanmoins, j'ai eu vite à me résoudre à un constat. Assouvir un fantasme, au féminin, c'est surtout une histoire de "avec qui". Car le fantasme est aussi une histoire de l'image de soit. J'en suis capable ou je n'y arriverai pas....voire souvent, vais-je être rejetée.

Par exemple, fantasme masculin très classique, mais aussi au féminin, la sodomie peut vite toucher l'image de soi, largement autant que l'inconfort de la situation si abordé maladroitement. Une femme qui se refuse à un amant qui lui courtise les fesses peut se retrouver empêtrée dans l'image d'une femme coincée, ou peu à l'aise avec son corps, voire incapable d'avoir une sexualité assumée / ouverte.
Si la sodomie  s'est banalisée, notamment pour les jeunes générations, prenez un autre fantasme pour souligner cet exemple, comme par exemple le fantasme du viol, celui de la pluralité, celui de la bisexualité, celui de l’exhibitionnisme.

Il est plus aisé d'aborder avec son amant ou son amante, des fantasmes qui vous installent dans un univers et un rôle qui est un peu décalé avec  l'image que vous projetez dans vos autres bulles intimes, les ami(e)s, la famille, le boulot ... et le/la conjoint(e).

J'ai moi même une demi tonne de fantasmes que je n'ai jamais mis en musique sous mon toit. Il est des sujets qui ne peuvent se mettre en oeuvre sans laisser de traces.

Mais ce jour là, je partageais sur nos fantasmes respectifs de manière assez directe et sans détour avec une amante devenue très très intime, et je suis tombé de haut. Nous qui avions construit un univers très charnel et sans autre vraie limite que nos emplois du temps, je me suis vu retourner un non catégorique à l'idée de lui offrir un trio avec deux hommes : "L'amour avec deux amants ? D'accord, mais pas avec toi ! "

Nous étions, à un second niveau, entrés dans cette entremêlement du sensuel et de l'attachement qui ne sublime plus du tout le coté charnel comme une nécessité ou un moteur, mais comme un moment de fusion amoureuse des corps ... et par la même, certains fantasmes ne pouvaient plus prendre forme sans laisser de traces, ou devaient se réaliser dans un secret qui ni ne blessent pas, ni n’entachent l'image de soi dans les yeux de l'autre. Mon amante, quel que soit le niveau d'accord et de convergence charnelle, n'imaginait plus la fusion des sens comme une exaltation qui disjoncte le cerveau et étanche une soif de l'autre, mais comme une réunion des deux parties, des deux moitiés d'un tout, cette fameuse recherche de l’âme sœur que l'on retrouve dans le mythe de l'androgynie du banquet de Platon.

Alors oui, quand cet état d'extase ne passe plus que par une et une seule personne, dans un amour fusionnel des sens et de l'esprit, alors, les fantasmes, notamment ceux qui introduisent un biais, voire un corps étranger, ne sont plus les bienvenus. Ce qui était très étonnant, c'est que nous avions construit cette bulle, bulle éphémère soit, dans un élan de couple illégitime qui avait commencé de manière fantasmatique et charnelle.

Un fantasme, ne vaut que s'il a pour but le plaisir (direct ou indirect). J'y ai ajouté à partir de ce jour là qu'un fantasme passe du théorique au concret si on a trouvé avec qui le cristalliser. Soit pour le sublimer, soit au contraire pour pouvoir s'en détacher.

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