mardi 13 décembre 2011

Mon amante est enceinte (de moi) (2)

Pour le coup, moi qui avait une approche de la maternité pleine de tendresse, j'ai été confronté à cette maternité dans mon couple illégitime sans y être vraiment préparé.

On ne se prépare pas à avoir un enfant en dehors du couple officiel. Et surtout, rien de ce qui pourrait être de la normalité dans un couple officiel, n'a l'apparence de normal dans un couple illégitime.

Avant même de me réjouir, ou de m'inquiéter, à haute voix, j'ai fait mille fois le tour de la question en quelques secondes dans ma tête, pour arriver à la conclusion que je ne savais pas, que je ne pouvais pas, que je ne voulais pas, que j'adorerais, que j'aurais préféré, que ce serait merveilleux, que ... tout s'entrechoquait, mais il y avait quand même des incontournables dans ma vie : L'amour ne se multiplie pas, le temps encore moins ... et s'il fallait me partager, soustraire une partie de moi à ma fille, je n'étais pas prêt à le faire. Dans mes amours illégitimes, je ne retirais rien à ma femme pour l'offrir à mes amantes. En revanche, pour l'éducation d'un enfant, je me trouvais confronté à mon implication en tant que père, que je ne pouvais pas concevoir à mi temps, à temps partiel, en pointillés.

- Ca y est, tu ne me vois plus en amante. Je suis une mère, plus une femme. Je sens dans ton regard que tu ne regardes plus à travers moi ce fantasme, ce plaisir, cette sexualité. Tout ça a disparu pour être remplacé par les courbes de mon ventre bientôt tout rond.

Le silence a été brisé par cet interjection unilatérale, j'avais dû laisser environ 5 à 6 secondes de silence. Pas de quoi sentir un souffle de malaise. Mais voilà, le schisme commençait à prendre place entre nous alors que ce fruit de nos amours aurait dû conforter tout ce que nous avions construit pas à pas sans dessiner de plan de vie.

Il est vrai que je n'avais pas encore remarqué que ses seins avaient pris une taille et qu'ils étaient douloureux, j'étais tellement loin d'imaginer une telle situation le jour précédent.

Lorsque ma femme est tombée enceinte, nous avons joué de cette situation en profitant de ce qui était un cadeau, comme une taille de bonnet et une libido boostée, compensation inespérée pour les haut-le-cœur qui forçaient le pragmatisme pendant les premiers mois. Avec mon amante, tout est devenu lourd de conséquence, et rien n'était plus léger du tout, d'un coup d'un seul.

- Tu te rends compte, je ne peux pas avoir un bébé avec toi, mon mari est blond aux yeux bleus comme moi ... c'est juste impossible, ça se verrait tout de suite.

Je n'avais pas eu le temps de faire une seule phrase, et en 15 secondes, tout était plié dans sa tête. Elle imaginait que je ne la désirais plus, et ce bébé ne pouvais pas naître, car il était un fruit trop coupable d'amours illégitimes auprès de son mari.

J'ai visité et revisité au cours des 10 dernières années ce qu'aurait pu être mon chemin de vie si tout avait été différent, et je me dis que j'aurais abouti au même constat, mais pas en 15 secondes. Il faut dire que, être en retard, acheter un test de grossesse, et le faire, ça a pris un peu de temps. J'aurais quand même aimé un peu de discussion, un peu de partage. Qu'on soit un peu synchrone.

La semaine suivante, nous étions chez le gynéco. Une étape assez étonnante, à vivre à deux. Deux (ou trois, je ne me souviens plus) petites pilules, et 36 heures d'attente. Le langage cru et similaire à celui d'un accouchement nous a placé "hors du temps", dans cet acte médicalisé mais presque banalisé qui utilise un contexte aussi lourd. Mais, heureusement, nous avons réussi à passer cette période de manière légère, et à reconstruire un "nous" après. Un "nous" avec la pillule.

Un "nous" totalement différent, un "nous" où toute la sensualité et toute la finitude de cette histoire ont pris le pas sur cette fusion ingénue et irréelle que nous vivions ... pour laisser la place à ce que tous les amants vivent : savourer chaque seconde comme si c'était la dernière, en sachant pertinemment que tout ce que la vie nous offre peut nous être retiré, en sachant clairement que 1+1 = 1+1 tant que nous nous autorisions à n'être que des amants ...

Et c'est ce que nous avons, tous les deux, vécu encore quelques temps ... une vie d'amants, une parenthèse enchantée, un chemin de traverse, des bulles de plaisir ...

jeudi 8 décembre 2011

Mon amante est enceinte (de moi) (1)

Les palpitations, une sueur soudaine, des frissons qui parcourent le corps, l'incapacité à former une phrase cohérente à l'annonce que votre amour est finalement fécond. Le ventre plat tant chéri va devenir plus rond, ce nombril vertigineux va changer, tout va devenir plus sérieux ... Ce n'est plus juste un rapprochement entre adultes pour regarder dans la même direction, il s'agit de donner la vie !

Voilà ce que j'ai ressenti lorsque ma femme m'a annoncé que le test était positif, un matin d'hiver, dans cet appart post estudiantin où nous vivions depuis le mariage ... merde, tout allait changer, comme prévu, plus vite que prévu, ou plus tôt ... le grand saut vers l'inconnu, sur ce grand chemin plein de petits et de grands bonheurs. Lorsque, quelques années plus tard, un nouveau test est revenu positif aussi, ce fût les mêmes palpitations, les mêmes bouffées de chaleur, une joie à sauter au plafond, le saut vers l'inconnu en moins.

En revanche, je n'ai pas eu tout à fait le même enthousiasme lorsque mon amante m'a dit :
- Il faut que je te dise quelque chose, assieds toi : je suis enceinte.

Merde ... j'ai loupé un virage. Merde, merde ... la contraception !
Merde ... j'ai loupé un virage. Un enfant de notre amour par accident !
Merde ... ma femme, ma fille, c'est juste pas possible !

Je suis passé par toutes les phases de l’introspection en quelques minutes.

Cet enfant, c'était juste un accident. Un accident qui ne m'étais jamais arrivé dans ma vie légitime. Un accident qu'on avait probablement organisé de manière inconsciente, tellement le sujet de la contraception n'avait jamais été ouvert.

Nous nous aimions tellement l'un l'autre, que sur les dernières années de notre relation, nous nous sommes comportés comme un couple. Notre intimité grandissante laissait des traces dans sa maison. J'avais ma place dans la salle de bain, le chien et le canapé me connaissaient autant que les voisins qui avaient pris l'habitude de me croiser. Quand une relation comme celle ci se construit, on partage beaucoup. Des petits bobos qui finissent en massage, à la relecture ou l'écriture à quatre mains de documents professionnels, jusqu'à partages sur le ton de la confidence sur les relations avec les autres, amis, famille, collègues, ...

Quand une relation comme celle ci se construit, on quitte le monde du fantasme. Aucune utilité de sortir les sextoys, les menottes, le tabouret ... nous avions fait l'amour exclusivement dans son lit, pour au moins les 5 dernières années de notre histoire. Aucune envie de chercher des artifices, des positions, des préliminaires de séduction de parade amoureuse. Nous étions amoureux et le duo était devenu un couple, il s'était imposé à nous. Au fur et à mesure, nous avons abandonné les précautions et ce qui ne nous faisait plus plaisir, ni à l'un, ni à l'autre. Aussi, l'amour langoureux, long et pénétrant a pris la place de nos ébats d'amants passionnés. Adieu fellation dans la voiture, sodomie en face du miroir de la salle de bain, et jeux de menottes et bandeaux sur les yeux. Quand j'y repense, je crois qu'il n'y avait plus de différence entre mon couple légitime et mon couple illégitime sur le point de vue de la sexualité, les deux étaient arrivés à un point de maturité similaire, où on ne se cherche plus parce qu'on s'est trouvé, parce qu'on sait où est l'autre et qu'il le sait aussi en retour. Une sorte de fusion.

Mais voilà. Le préservatif que je glissais sous l'oreiller avait perdu de son utilité, la protection qu'on y mettait tous les deux n'avait plus de raison d'être une fois la confiance installée. Une fois que nos yeux disaient "c'est pas juste une histoire, c'est plus qu'une histoire". Tout un champs sexuel s'est ouvert à nous comme cela se passe entre deux amants qui abandonnent le préservatif, mais aussi, la fondation d'un duo sans enjeu. Je m'offre à toi et je te reçois entièrement, sans barrière de latex. Je m'ouvre à toi et je t'écoute, tes émotions, tes histoires du quotidien, tes angoisses, tes histoires de familles. Je partage avec toi et je te laisse partager en retour mon histoire, mes leviers, mes fantasmes, ce qui me fait plaisir et ce qui me gêne un peu ou plus que ça. Je construis avec toi !

Au fur et à mesure, nous avons fonctionné de plus en plus naturellement, au point de partager de plus en plus. Le passage d'amants à duo avait été sacralisé par l'abandon du préservatif. Nous avions franchi l'étape suivante, le passage de duo secret à couple sans vraiment savoir comment et quand. Mais la conséquence était là. J'avais ma place dans ce foyer là aussi, avec un nouveau cercle d'amis, avec des habitudes et des rythmes propres ...

Ce jour là, lorsqu'est tombé la phrase "Je suis enceinte", c'est tout un monde dans lequel je flottais qui a radicalement changé. J'ai été mis en situation de refaire l'inventaire de tout ... ce que je voulais, ce que je désirais, ce que j'aurais aimé, ce qui était possible, ce qui n'était pas possible, ce que la vie ne m'offrait pas, ne nous offrait pas.

Tout commençait à partir d'une test de grossesse positif [...]
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