vendredi 12 août 2011

Vous les Français, vous êtes des tendres

Les voyages en avion sont le lieu de tellement de belles rencontres ! Ce jour là, l'avion n'était pas plein, et comme d'habitude dans ce cas là, chacun dispose de plusieurs sièges, et pas de voisin. Mais j'ai eu l'honneur d'être le voisin d'une charmante blonde qui m'a conté sa vie époustouflante. Elle a commencé par se rapprocher de moi alors qu'un siège nous séparaient, et à entamé la discussion en racontant son voyage.

"Je suis fatiguée de ce voyage, j'ai hâte de rentrer chez moi". Le tout avec un accent russe, je me suis dit qu'il y avait là une contradiction savoureuses. Son accent laissait paraître ce coté exotique qui chatouille l'oreille, certaines tournures de phrase prêtaient à sourire, et elle avait une telle fraîcheur dans ses propos que la conversation fut aisée.

La belle paraissait la bonne trentaine, grande blonde aux longs cheveux, filiforme, habillée mi naturelle, mi Courchevel, elle était de celles sur lesquelles on se retourne.

Ce qui est intéressant lorsqu'on lance une conversation avec un(e) inconnu(e), c'est que si la timidité arrive à s'éloigner, il est assez aisé de lancer des sujets intimes, tant l'anonymat et les chemins qui ne se recroiseront pas nous protègent l'un l'autre des conséquences du "j'en ai trop dit".

Je l'ai bien évidemment laissé me conter son parcours. Excusez du peu, un vrai roman. Cette fille, du Kazakhstan, a parcouru l'Europe avec une troupe de danseuses dans ses jeunes années. La danse était une véritable manière d'être considérée, de voyager et de s'évader du sort qui est encore réservé aux femmes dans son village natal.

Elle m'a raconté longuement sa rencontre avec son mari, un français qui est venu à plusieurs représentations à travers l'Europe, la suivant de ville en ville. Un homme qui était d'une attention "si romantique". Ses yeux pétillaient d'amour quand elle mettait des mots sur cette rencontre, et cette "belle vie" qu'elle a maintenant, mariée avec lui, dans une petite ville française. "Vous, les français, vous êtes des doux, des tendres, des romantiques. Chez moi, les hommes sont brutaux. Ils prennent une femme et ne s'en occupent pas. A part les enfants et le ménage, il n'y a pas d'avenir."

C'est quand je lui ai demandé si elle revenait d'une tournée avec sa troupe de danseuse que j'ai reçu les clés de ce que je n'avais pas encore compris : "Danser, moi, mais je suis trop vieille maintenant. J'ai arrêté il y a dix ans. Quel âge tu me donne ? J'ai 38 ans maintenant, la danse c'est fini, et en plus, je suis grand-mère". Et de comprendre au fur et à mesure des confidences la situation de sa fille, restée dans le village natal, et qui avait mis en route la génération suivante.

Choc des cultures entre la mère et la fille. L'une avait touché du doigt la vie à l'occidentale, et exprimait telle une première génération d'émigrant tout l'enthousiasme et toute la fraîcheur vis à vis des choses de la vie que nous ne voyons même plus. L'autre, très jeune mère de famille, considérait l'occident comme trop dangereux, trop loin, sans valeur, dégénéré, et ne répondait pas aux sollicitations de sa mère à venir la rejoindre vivre en France.

Quel délice que de discuter pendant une heure, et de recevoir une leçon de vie, sur cette qualité de la vie à l'occidentale, sur cette force de l'amour d'un homme et d'une femme pour former un beau couple improbable basé sur une heureuse rencontre. Une leçon de vie aussi sur cette ténacité d'une mère envers sa fille, sur cet amour maternel qui fait parcourir des milliers de kilomètres, sur cette envie de vivre cette relation de mère et grand-mère, de lui ouvrir les yeux sur une belle expérience, et finalement, de respecter ses choix.

2 commentaires:

  1. j'aime beaucoup la rencontre romantique entre cette dame et son futur mari...et vous la relatez bien joliment :-)

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  2. Cette histoire a un écho tout particulier en moi.
    Je réside loin, très loin de la France. J'y ai laissé ma fille, qui habite Lyon (et oui Monsieur Ed ;-)).
    Elle me manque. Souvent.
    Je ne la vois pas assez, c'est évident. Nous perdons elle et moi en proximité sans doute.
    Mais je ne peux laisser ma vie pour la sienne et son monde, qu'elle n'a pas envie de quitter, n'est plus le mien.
    Nous préférons vivre éloignées et profiter de chaque instant quand nous pouvons en partager que de courir le risque de nous reprocher d'avoir "sacrifié" (quel horrible mot ! ) quelque chose qui nous est essentiel, à l'une ou à l'autre.

    Peut être un jour aurat-elle envie de venir chez moi. Peut être un jour aurais-je envie de rentrer en France. Qui sait ce que réserve l'avenir ?
    En attendant, nous essayons d'être heureuses chacune de notre côté car nous avons compris que c'est la meilleure façon d'être ensuite heureuses ensemble.

    Nuits, so far away from you.

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